Le sujet de l’initiative est central pour tous les managers qui veulent « libérer le geste » et encourager l’intelligence des situations, au service d’une relation clients plus attentionnée et plus sincère.
Mais comment s’y prendre pour le travailler ?
C’est justement la question que s’est posée mon ami Georges il y a quelques semaines… Quelques jours après une réunion de co-construction avec son équipe qui a tourné court faute de propositions, il m’a partagé son désappointement :
« Mon équipe n’a aucune capacité d’initiative. D’ailleurs, dès qu’un conseiller rencontre un problème, il vient me demander la solution … Sais-tu s’il existe des formations pour leur apprendre à prendre des initiatives ? ».
Je l’interroge sur l’histoire et les passions de ses collaborateurs, et de fil en aiguille, j’apprends que l’un d’entre eux vient de faire une régate en solitaire de 3 mois, qu’un autre est représentant des parents d’élèves et qu’un troisième est président d’un club de tennis… Beau palmarès pour une équipe incapable d’initiative !
L’initiative, c’est comme l’empathie : c’est une capacité humaine que nous avons tous en nous. Certains contextes nous incitent à la mobiliser, d’autres nous incitent à la mettre en repos.
Ce constat nous invite à regarder le sujet du management de l’initiative sous un nouvel angle: et si la responsabilité du manager n’était pas de développer la capacité d’initiative, mais plutôt de mettre en œuvre, par son management au quotidien, un environnement qui autorise, encourage et valorise la prise d’initiative (y compris si cette initiative se solde par un échec) ?
Cette responsabilité n’est pas si facile à endosser, notamment quand, comme Georges, vous avez été nommé manager sur la base de votre expertise. Georges a toujours fondé sa légitimité sur sa capacité à apporter la meilleure solution à son équipe et à la faire appliquer… A force d’apporter lui-même les solutions à tous les problèmes, à force d’expliquer précisément ce qu’il faut faire et comment il faut le faire, à force de contrôler que ce qu’il demande de faire est bien appliqué, il a conforté au sein de son équipe la croyance que les décisions et les solutions sont l’apanage du chef, et que le rôle de l’équipe est d’appliquer. Cette croyance s’est transformée en habitude, et exit les initiatives !
La représentation qu’a Georges de son rôle n’est pas isolée, c’est une représentation culturelle partagée dans beaucoup d’entreprises…
S’il veut développer des conditions de travail qui encouragent l’initiative, Georges devra passer d’une posture de manager expert, qui construit sa légitimité sur sa capacité à apporter LA solution, à indiquer comment la mettre en oeuvre et à vérifier que c’est fait, à une posture de manager facilitateur, qui construit sa légitimité sur sa capacité à prioriser les sujets à traiter, à faire émerger différentes solutions du collectif, à en orchestrer l’expérimentation en « mode lab » et à organiser la capitalisation.
Voici l’exemple d’une démarche lancée par Sandra, manager de magasin, et dont pourrait s’inspirer Georges :
Sandra propose à ses équipes de réinventer la relation client. Elle demande à chacun de noter pendant 1 semaine sur un grand tableau blanc toutes les idées qui leur passent par la tête pour faire des moments de relation client des moments forts et marquants pour le client.
A la fin de la semaine, elle organise une réunion d’équipe pour partager les idées, les compléter et choisir celles qui seront testées la semaine à venir. Chacun fait son marché et choisit ce qu’il a envie de tester. Il n’y a pas d’interdit, les collaborateurs sont autorisés à tout essayer ; la seule chose qui compte, c’est l’intention : celle de faire vivre au client un moment d’exception.
Sandra suit de près les tests tout au long de la semaine : elle observe, interroge les clients au sortir du magasin sur ce qu’ils ressentent, discute avec chacun de ses conseillers pour les aider à enrichir leurs tests au fil de l’eau .
A la fin de la semaine, chacun partage ses fiertés, ses difficultés et ses enseignements, le collectif décide des pratiques à adopter et choisit de nouvelles pratiques à tester durant la semaine suivante.
L’expérimentation de Sandra n’est qu’un exemple, mais elle illustre parfaitement la démarche de management par le Lab. Ce type d’approche, reproduit régulièrement sur différents sujets, permet de faire savoir que l’initiative est encouragée, de créer un milieu protégé dans lequel les équipes peuvent s’autoriser à « sortir des clous » sans prendre de risque, et de développer la confiance des collaborateurs en leur capacité à prendre de « bonnes » initiatives.
Elle crée 3 conditions clé à la prise d’initiative :
- La permission : je sais que l’initiative est encouragée
- La protection : je sais que quand je prends des initiatives dans le cadre défini, je ne prends pas de risques ou je prends des risques assumés par le collectif
- La puissance : j’ai confiance en ma capacité à prendre des initiatives à bon escient.
Revenons à mon ami Georges et voyons à quoi cette discussion l’a mené.
Georges a décidé de partir à la chasse aux « tue-l’initiative ». Tous les soirs, pendant une semaine, il s’est contraint à revenir sur sa journée et à lister chacune de ses paroles et chacun de ses actes contradictoires avec les sentiments de permission, de protection et de puissance.
Et en un mois, Georges a transformé en profondeur sa manière de manager !
Si le sujet vous intéresse, je vous donne rendez-vous après les fêtes, pour le 4è article de cette série dédiée au management sur l’intention autour du Défi n° 3 : Aider les collaborateurs à développer leurs compétences relationnelles et émotionnelles.
Je suis également à votre disposition pour échanger avec vous autour de vos projets de transformation managériale : nruchaud@acemis.fr.
[Le « management par l’intention »™ est une marque déposée par Acemis.]