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Dernière partie de carrière : quelle expérience pour vos collaborateurs ?

Après avoir abordé dans un précédent article le sujet de la « surcharge de travail », nous allons évoquer ici un moment clé dans la vie des collaborateurs : la dernière partie de carrière.

Il est des événements extérieurs aux entreprises qui ont pourtant des impacts forts sur l’expérience collaborateurs. Parmi ceux-ci, la réforme des retraites.

Elle fait partie des déclencheurs qui amènent les salariés à ouvrir leur “dossier retraite” avant que le couperet des nouvelles mesures ne leur tombe dessus. Elle suscite aussi beaucoup d’interrogations chez les collaborateurs qui voient leur durée de travail s’allonger.

Comment réfléchir et choisir l’expérience que vous voulez faire vivre à vos collaborateurs en dernière partie de carrière ? Voici quelques conseils issus de nos interventions sur ce sujet.

Deux craintes majeures

Globalement la dernière partie de carrière, du point de vue des collaborateurs, se joue sur le registre de la maîtrise et plus précisément sur la crainte d’une perte de maîtrise. Après le départ en retraite, mais aussi lors des dernières années de vie active.

1️⃣ La peur de la relégation

L’idée selon laquelle la dernière partie de carrière serait une lente pente descendante vers l’inactivité reste très répandue en entreprise. Notamment de la part du management, parfois aussi dans la fonction RH. Les réflexions sont alors très centrées sur « comment accompagner nos collaborateurs jusqu’au départ ». Le plus souvent en oubliant que les collaborateurs – une grande partie d’entre eux – souhaitent rester actifs dans leur travail et en maîtrise de leur trajectoire professionnelle.

En témoignent certaines expressions, telles que :

➡️ Les seniors : certaines entreprises appellent encore ‘seniors’ les collaborateurs de plus de 45 ans. Ce faisant, elles marquent qu’ils sont en fin de carrière alors que pour un grand nombre ils n’en sont qu’à la moitié.

➡️ Les plus de 50 ans : expression que j’entends très fréquemment pour marquer une forme de décalage desdits collaborateurs par rapport aux nouveaux modes et outils de travail. En oubliant, par exemple, qu’en 2023, les plus de 50 ans ont commencé à travailler après la démocratisation de l’informatique et sa pénétration dans tous les milieux professionnels et sociaux.

Le maintien de ces expressions enferme les collaborateurs en dernière partie de carrière dans une forme de passivité. Comme si toute possibilité de développement professionnel était exclue pour eux. Et leur fait craindre de ne plus pouvoir accéder aux opportunités de carrière, aux formations, aux projets à moyen long terme, etc. En somme de ne plus avoir la main sur ce qu’ils souhaitent faire de leurs dernières années de vie active.

2️⃣ La perte d’autonomie

« Autant dans la vie pro on a droit à l’erreur, autant à la retraite on n’a plus le droit »

Symboliquement, l’entrée dans la fin de carrière marque aussi l’entrée dans une période (sans retour arrière) de perte d’autonomie physique, mais aussi financière.

➡️ Les démarches que je fais aujourd’hui conditionnent mon avenir et ma capacité à vivre dans de bonnes conditions, et ce dans une période (à venir) où je perdrai progressivement les ressources physiques et psychiques pour me permettre de me retourner.

Cette perspective peut être particulièrement anxiogène pour une bonne partie de vos collaborateurs. Et avoir des répercussions négatives sur leur état psychique, leur capacité à travailler, leurs relations avec leurs collègues et/ou avec leur manager, etc.

 

Fin de carrière : ceux qui entament les démarches pour partir

Pour permettre à vos collaborateurs de vivre cette étape dans les meilleures conditions possibles, trois conseils :

1️⃣ Connaître les temps forts du point de vue de vos collaborateurs

Il me semble intéressant de distinguer trois temps forts principaux, durant lesquels les attentes et les émotions sont sensiblement différentes :

➡️ « J’ouvre mon dossier retraite »

C’est très souvent le moment où les collaborateurs découvrent la complexité du sujet et des démarches à réaliser. Il y a alors de la surprise et de l’inquiétude. Et le besoin d’en parler et d’être rassuré.

➡️ « Je réalise les démarches pour partir »

Ce moment est celui où les collaborateurs réalisent les démarches pour partir. Il peut durer plus ou moins longtemps. Mais il est toujours un temps d’incertitude et d’inquiétude :

  • Est-ce que je m’adresse au bon interlocuteur ?
  • Est-ce que les informations sur lesquelles je m’appuie sont les bonnes ?
  • Est-ce que je fais bien les choses dans le bon ordre ?
  • Etc.

Ce moment peut aussi se conclure par de fortes émotions pour certains collaborateurs, par exemple s’ils constatent qu’ils vont devoir rester plus longtemps qu’ils l’imaginaient ou au contraire s’ils découvrent qu’ils doivent partir très rapidement pour bénéficier des dispositifs mis en place par leur entreprise.

➡️ « Je vis mes derniers moments au sein de l’entreprise »

Le temps des démarches est achevé : votre collaborateur sait à quel moment et dans quelles conditions il va pouvoir partir. Dès lors, l’attente majeure s’exprime en termes de reconnaissance qui peut prendre différentes formes selon le parcours professionnel et la situation de vos collaborateurs.

Il y a bien sûr la reconnaissance directe de ce que le collaborateur a apporté à l’entreprise (et idéalement pas uniquement sur son dernier poste). Mais il y a aussi des messages indirects, souvent trop peu travaillés. Par exemple :

  • Qu’est-ce qu’on me demande/propose durant mes derniers moments à mon poste ?
  • Est-ce que je vais pouvoir transmettre mes dossiers, mes compétences, mon expérience… ?
  • Est-ce que je pourrai conserver un lien avec mon entreprise et/ou mes collègues ?
  • Etc.

2️⃣ Simplifier votre parcours « fin de carrière »

Le parcours fin de carrière commence au moment où vos collaborateurs décident d’ouvrir leur “dossier retraite” et se termine au moment où ils reçoivent leur première mensualité.

Selon les étapes du parcours, leurs attentes seront de différents ordres :

  • Disposer d’un interlocuteur et savoir s’orienter vers le bon ;
  • Accéder facilement à une information compréhensible ;
  • Savoir se repérer dans la succession des démarches à réaliser ;
  • Etc.

Pour simplifier le parcours fin de carrière de vos collaborateurs, il est donc important de commencer par décrire celui-ci du point de vue de vos collaborateurs et de l’analyser au regard de leurs attentes étape par étape.

C’est ainsi que vous pourrez identifiez les points de complexité de votre parcours actuel et choisir les actions à mener pour les lever.

3️⃣ Outiller vos managers

Vos managers de proximité ont un rôle important à jouer, pour autant il est important de ne pas ajouter ce rôle à la liste déjà longue de ce qu’ils ont à faire.

Pour ce faire, il est utile de faire de ce sujet, un sujet d’équipe (manager compris) et d’anticiper certaines actions en les intégrant dans les pratiques collectives habituelles.

Parmi les actions d’accompagnement de vos managers, en voici trois qui me semblent nécessaires :

✅ Leur donner les informations utiles :

  • Les aider à comprendre ce qui se joue dans cette période pour leurs collaborateurs.
  • Leur permettre de connaître précisément leur rôle : ce sur quoi vous les attendez ; ce sur quoi vous ne les attendez pas et sur ces sujets, vers qui ils peuvent orienter leurs collaborateurs.

✅ Leur donner les clefs pour répondre aux attentes des collaborateurs en fin de carrière :

  • Connaître les dispositifs mobilisables.
  • Apporter une reconnaissance adaptée aux attentes de chaque collaborateur.

✅ Les outiller pour garantir la continuité de l’activité :

  • Identifier les transferts de compétences et d’expérience à réaliser et organiser ces transferts.
  • Le cas échéant, savoir faire des choix dans les sujets à traiter pour pallier un départ non remplacé.
  • S’assurer que le départ du collaborateur n’aura pas de conséquences fâcheuses sur la dynamique de l’équipe.

 

Dernière partie de carrière : ceux qui vont rester plus longtemps 

1️⃣ Ceux qui craignent d’être relégués

✅ Changer les représentations

Comme je l’ai évoqué plus haut, cela commence par le langage et les expressions qui circulent sans être questionnées.

Vous pouvez aussi mener un certain nombre d’actions directes telles que mettre à l’honneur vos professionnels les plus anciens, mettre en valeur les acquis de l’expérience et pas uniquement les compétences, communiquer sur les fondamentaux des métiers et pas seulement sur les nouveautés, etc.

Il est utile de le faire en direction de votre ligne managériale pour l’aider à se départir de ses préjugés, mais aussi à plus grande l’échelle pour donner à voir à vos collaborateurs en dernière partie de carrière qu’ils ont toute leur place au sein de votre entreprise.

✅ Suivre quelques indicateurs et choisir vos actions en conséquence

Accès à la formation, accès aux promotions, changements de poste… sont autant d’indicateurs que vous pouvez suivre pour vérifier qu’il ne se produit pas de décrochage au-delà d’un certain âge.

Ceci vous permettra d’identifier les sujets sur lesquels intervenir et/ou les directions, unités, métiers… dans lesquels une action ciblée est nécessaire.

2️⃣ Ceux qui se demandent comment ils vont pouvoir tenir

Il est peu évoqué dans les réflexions sur l’expérience collaborateurs, pourtant c’est un enjeu essentiel du point de vue des collaborateurs : pouvoir tenir et durer dans son métier.

Cela implique, avant tout, d’intervenir sur les conditions d’exercice des métiers (avec l’avantage que vos actions bénéficieront à tous vos collaborateurs, quel que soit leur âge).

Vous pourrez compléter cela par des dispositifs permettant de réduire le temps réel d’activité de vos collaborateurs.

✅ Conditions de travail : sortir des idées reçues

▶️ Non, les solutions à mettre en place ne se feront pas au détriment de votre performance

Comme le dit si bien Yves Morieux, « performance and satisfaction at work are the two sides of the same coin». Chaque action que vous ferez en faveur des conditions d’exercice des métiers aura concomitamment des répercussions positives sur votre niveau de performance.

▶️ Non, il ne s’agit pas uniquement de réduire la quantité de travail de vos collaborateurs

Il y a bien sûr le sujet de la pénibilité physique, qui se traite avec les aménagements et les équipements ad hoc.

Mais en dehors de cela, l’analyse de la charge de travail et de l’usure qu’elle peut engendrer pour vos collaborateurs va bien au-delà.

En commençant par prendre en considération tous les facteurs contribuant au sentiment de surcharge et à analyser pour chaque métier ceux qui créent de l’usure. Puis en ciblant vos actions en conséquence, chaque facteur de surcharge de travail appelant des réponses différentes.

▶️ Non, proposer à vos collaborateurs de se désengager de leur travail avant même leur départ n’est pas un gage d’expérience collaborateurs satisfaisante.

Cela dépend de vos collaborateurs, de leur parcours et de leur attachement à votre entreprise, du plaisir qu’ils prennent à leur travail et de leur place au sein de l’équipe.

Le simple fait de conserver toute sa place au sein de l’équipe et en tant que professionnel (c.-à-d. ne pas être mis progressivement sur la touche en prévision d’un futur départ) est souvent suffisant pour permettre à vos collaborateurs d’y trouver leur compte et de prendre plaisir à rester au travail.

✅ Dispositifs complémentaires

Si vos actions en faveur des conditions et de la charge de travail n’adressent pas toutes les difficultés de vos collaborateurs en dernière partie de carrière (ou si elles n’ont pas encore porté leurs fruits), alors des dispositifs complémentaires peuvent pallier.

Il s’agit là de soulager vos collaborateurs en réduisant la part de leur temps de travail consacrée à des activités usantes ou pénibles :

  • Réduction progressive du temps de travail ;
  • Aménagement des horaires ;
  • Formation des nouveaux arrivants et tutorat ;
  • Mécénat de compétences ;
  • Etc.

 

🔎 Vous souhaitez en savoir plus et/ou être accompagné pour améliorer l’expérience de vos collaborateurs en dernière partie de carrière  ? Nous sommes là pour vous : nous contacter

[© Article publié par Noémie Royer sur le blog « Une tête au-dessus de soi-même » le 6 février 2023 – Tous droits réservés.]

 

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