Ou comment le management des changements accompagne vos projets de transformation de l’expérience collaborateurs
Q1. Bonjour Noémie, bonjour Caroline, et merci de passer ce temps avec nous pour tracer le lien entre expérience collaborateurs et accompagnement des changements. L’idée de nos échanges est de parcourir successivement 3 cas intéressants et fréquents, dans lesquels l’expérience collaborateurs et le management des changements se complètent pour enrichir les solutions apportées. Je vous propose de rentrer dans le vif du sujet, en commençant peut-être par préciser notre premier cas.
Noémie : Pour aider à mieux cerner le sujet de ce premier article, il peut être intéressant de se projeter directement dans un exemple. De plus en plus, les entreprises nous demandent de les aider à traiter leurs problématiques de surcharge de travail. Récemment, dans une entreprise de services, pour adresser cet enjeu, nous avons travaillé avec les collaborateurs sur plusieurs leviers : améliorer l’organisation du travail, réduire le reporting ascendant, restaurer la coopération, donc l’efficacité collective, et réduire le nombre d’applications hors cœur de métier utilisées par les équipes. Pour sécuriser la mise en œuvre des projets liés à la réduction du nombre d’applications et du reporting ascendant, nous avons eu besoin de mobiliser l’approche change. Sur la réduction du nombre d’applications, cela parait évident; en revanche, sur le reporting, ça l’est peut-être un peu moins. Je propose de creuser ensemble cet aspect.
« Pour sécuriser la mise en œuvre des projets liés à la réduction du reporting, nous avons eu besoin de mobiliser une approche d’accompagnement des changements »
Caroline : Oui, c’est un cas que l’on a beaucoup rencontré : il n’est vraiment pas rare de devoir réduire le volume de reporting lorsque l’on cherche à améliorer l’efficacité opérationnelle d’une entité. On a notamment souvent l’exemple de managers de proximité éloignés de leurs équipes, car consignés à leur bureau pour effectuer des tâches administratives. Comment assurer son rôle de management de proximité lorsque l’on n’est pas en proximité de ses équipes ?
Noémie : Ce n’est pas évident en effet ! De notre expérience, 80% des sujets de surcharge de travail sont d’abord des sujets d’efficacité opérationnelle. Les managers ont un rôle crucial à jouer de ce point de vue-là : il est important qu’ils portent cette préoccupation et qu’ils y travaillent en pleine coopération avec leurs équipes.
Alors bien sûr, on va s’intéresser aux pratiques managériales, mais pas que ! Ce qui garantit l’efficacité opérationnelle d’un service, c’est beaucoup l’organisation du travail qui permet aux collaborateurs de donner ou non le meilleur d’eux-mêmes. C’est pour cela que notre approche expérience collaborateurs s’articule autour de deux axes :
- L’organisation du travail : agir sur l’organisation quotidienne, les activités, les tâches, les outils de travail, etc. afin de mettre les collaborateurs dans les meilleures conditions pour réaliser un travail utile, efficace et de qualité
- Les pratiques managériales : aider la ligne managériale à mettre en place des pratiques qui permettent de faire vivre cette organisation au quotidien, sur le terrain et dans les services.
Q2. Merci, cela clarifie le sujet. Donc Noémie, sur ce constat de surcharge de travail, vous avez identifié entre autres la nécessité de réduire le reporting. Facile à dire mais est-ce que c’est vraiment facile à faire ?
Noémie : Pas du tout ! D’abord, parce qu’il faut évidemment retirer tout ce qui est superflu tout en conservant bien sûr ce qui est indispensable. Ce travail doit se faire avec les équipes qui produisent le reporting, mais aussi avec les fonctions support qui le reçoivent et l’utilisent. Une fois que c’est fait, il faut aider les managers de proximité à réinvestir leur rôle de management et accompagner les équipes du siège à transformer leurs pratiques, pour les adapter à la réduction du reporting ascendant. Ce type de transformation, par les changements qu’il implique, nécessite un accompagnement.
Caroline : En effet, qui dit changement, dit forcément une certaine forme de déstabilisation du groupe. Dans le cas présent, la transformation proposée a eu un impact :
- Sur les managers de proximité, qui doivent se reconcentrer sur leurs tâches de management, et revenir justement en proximité de leurs équipes
- Sur leurs équipes, qui s’étaient peut-être habituées à ne plus avoir leur manager en proximité
- Sur les collaborateurs du siège, qui ont adapté leurs pratiques au nouveau reporting. Ce type d’impact collatéral est souvent sous-évalué dans les transformations.
Mener une approche change en complément de la démarche d’expérience collaborateurs permet d’opérer correctement la bascule, de respecter et d’accompagner le temps de rééquilibrage pour faire adhérer aux changements et renouer avec l’efficacité. Il s’agit d’accompagner les managers et leurs équipes dans les transformations, en apportant une méthode analytique précise, qui permet également de piloter les changements au niveau des populations et d’anticiper leurs impacts possibles sur le reste de l’organisation.
« Mener une approche management des changements en complément de la démarche d’expérience salariés permet d’opérer correctement la bascule, de respecter et d’accompagner le temps de rééquilibrage pour faire adhérer aux changements et renouer avec l’efficacité »
Q3. D’accord. En fait, si je comprends bien, la démarche par l’expérience collaborateurs, lorsqu’elle débouche sur un besoin de transformation, s’enrichit du management des changements pour orchestrer la mise en musique, c’est bien cela ?
Noémie : Voilà ! Dans ce cas précis, l’expérience collaborateurs fait l’expression du quoi et s’enrichit du change pour bâtir le comment. L’expérience collaborateurs déniche un problème fonctionnel et coconstruit une solution avec les équipes. Aborder la mise en œuvre avec une double approche change – expérience collaborateurs permet de multiplier les effets bénéfiques de la transformation.
Caroline : En notant également que l’enrichissement est double, puisque le point de vue expérience collaborateurs est un bon terreau pour un accompagnement change réussi : les attentes et besoins des équipes sont exprimés et pris en compte en amont. Ça change des accompagnements plus « classiques », c’est tout bénéfice !
Marie : Merci infiniment à vous deux, c’est très clair. Notre premier cas d’usage illustre parfaitement la garantie de succès que fournit le management des changements à une transformation induite par l’expérience collaborateurs : il lui donne les bons outils pour en assurer la réussite dans la durée. On comprend bien en quoi ce rapprochement constitue un véritable enrichissement mutuel. Dans le second article de notre série, nous nous intéresserons au cas particulier d’une transformation qui n’a pas porté ses fruits ou comment change et expérience collaborateurs peuvent aider à comprendre ce qui a empêché la concrétisation des projets et renouer avec l’atteinte des objectifs qu’ils portaient.
Caroline Parent est experte en management des changements et directrice du pôle change chez Acemis ; Noémie Royer a exercé près de 20 ans en entreprise à différentes fonctions de direction (finance, organisation et systèmes d’informations, opérations) et est aujourd’hui directrice du pôle expérience collaborateurs d’Acemis. Elles cumulent chacune plus de 20 années d’expertise dans leur discipline. Leurs propos ont été recueillis par Marie Legoëdec, manager chez Acemis.